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Maillot une pièce ou deux pièces : comment choisir entre patriarcat et cellulite ?

Deux-pièces ou une-pièce ? Derrière le choix du maillot, un dilemme féministe, économique et esthétique. Que l'on se baigne dans la Seine ou dans la mer

Deux-pièces ou une-pièce ? Derrière le choix du maillot, un dilemme féministe, économique et esthétique.

L’été est une dissertation de philo en plein cagnard. Sujet : que révèle votre maillot de bain ? Une-pièce, deux-pièces ou panique identitaire textile ? Tentative de décryptage entre glamour, injonctions paradoxales et Simone Veil à la piscine.

Le bikini n’a jamais été un simple bout de tissu. C’est un manifeste, un coup d’état textile, une déclaration d’indépendance de 67 grammes (poids moyen d’un bikini XS chez Jacque***). En 1946, il explose dans les magazines comme une bombe — littéralement, son nom vient d’un atoll où les Américains testaient des armes nucléaires. Rien que ça.

Depuis, c’est devenu la tenue officielle du corps désirable en été. Un standard aussi oppressant qu’un tube de crème solaire vide à 10h du matin. On le veut mini, échancré, audacieux, tendance. Mais pas trop. Montre ton corps, mais pas vulgaire. Assume tes formes, mais fais trois pilates avant (surtout l’efficace pilate des Caraïbes). Et fais genre que tu t’en fous, tout en captant la lumière parfaite pour ton post « Sun, skin & salt ».

Résultat : 73 % des femmes choisissent leur maillot en fonction de leur playlist audio. Fausse étude, certes, mais probablement plus fiable que les algorithmes de recommandation de Shein(tik)tok.

Le une-pièce, c’est le tailleur-pantalon de la plage

Pendant ce temps, le maillot une-pièce fait son grand retour. Mais pas celui de votre prof de natation de CM2. Non, un une-pièce hautement éditorialisé, vendu 150 euros et baptisé « Minimal Wave – couleur sable chaud ». Il couvre plus, donc rassure. Il évoque l’élégance discrète, le rétro-chic, la dignité post-body-positive. C’est le tailleur-pantalon de la plage. L’armure textile de celles qui veulent nager sans devenir contenu.

Mais là encore, ambiguïté : ne serait-ce pas une pudibonderie déguisée ? Une stratégie de fuite face au male gaze, qui reste là, planqué sous ses Ray-Ban, prêt à liker avec ferveur une fesse rebondie sur fond de yacht. D’autant que, comble de l’absurde, le une-pièce d’aujourd’hui est parfois plus échancré que le bikini d’hier. Il faut avoir fait normal sup’ pour comprendre la logique.

Maillot, male gaze et maire de Paris

Au fond, le maillot de bain est un artefact hautement politique. Le bikini peut être perçu comme l’uniforme de l’hypersexualisation par excellence, adoré par les algorithmes de Google Images (« les stars en maillot de bain » reste une des requêtes les plus populaires chaque été). Mais il peut aussi être une arme de riposte textile : mon bikini, c’est mon atoll d’indépendance.

Il y a dans cette guerre de tissu une mise en scène du pouvoir — et de ses faux semblants. Barbie passe du surf rose bonbon au maillot doré sans jamais transpirer ni se demander si la doublure (pas Ken) sèche bien. Les Kardashian l’ont monétisé. Les influenceuses posent dessus comme sur une table basse Louis XV (ceci n’est pas un placement de produit d’un vendéen à particule) — avec grâce, détermination, et une absence totale de propriété du yacht.

Et que dire des politiques ? Imaginez un instant Anne Hidalgo en maillot une-pièce vintage, inaugurant la réouverture de la Seine à la baignade, juillet 2025, sourire figé, bouée tricolore. Derrière elle, Amélie Oudéa-Castéra remonte à l’aide d’une échelle en inox, façon Ursula Andress dans Dr No, « looking for shells ? » Simone Veil et Alice Milliat en hologramme applaudissent. Il n’y a plus de requins dans la Seine, seulement des électeurs.

Faut-il vraiment trancher ?

Un deux-pièces, c’est une attitude. Un une-pièce, c’est une posture. Les deux sont surveillés par l’industrie de l’image, de la minceur, du lifestyle et de la bienséance. L’absurde, c’est qu’on attend des femmes qu’elles soient à la fois hot et humbles, fières de leurs corps mais pas exhibitionnistes, sportives mais pas vaniteuses. Et surtout, photogéniques même en train de ramasser leur tongs pleines de sable.

Alors pourquoi choisir ? Pourquoi trancher ? Pourquoi toujours politiser le choix d’un truc qu’on finit de toute façon par enlever pour se baigner en cachette quand tout le monde regarde ailleurs ?

Peut-être faudrait-il inventer autre chose. Un post-maillot. Un anti-maillot. Un concept radical. Ou juste… la liberté. Celle de porter ce qu’on veut, où on veut, sans devoir entrer dans un débat de société à chaque bretelle.

Bikini, donc je suis ?

Le choix du maillot n’est jamais neutre. Il est chargé de récits, de fantasmes, d’algorithmes, de regards. Il flotte dans le tumulte des normes comme une frêle embarcation. Mais il peut aussi, parfois, être un pur plaisir. Un geste léger, joyeux, inutile.

Et ça, c’est peut-être le plus subversif.

Alors, une-pièce, deux-pièces ou combinaison intégrale d’apiculteur en lin bio, peu importe. Ce qui compte, c’est de pouvoir dire : « Je suis venue, j’ai vu, j’ai bronzé, j’ai nagé. » Et tant pis si personne ne like.

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(c) Ill. têtière : Los Muertos Crew

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