Ch4ud l’infø

LinkedIn, là où la langue de bois fait carrière

LinkedIn, royaume du bullshit managérial, cache précarité et conformisme sous des mots-voiles, démasqués par Klemperer, Hazan et Orwell

LinkedIn, royaume du bullshit managérial, cache précarité et conformisme sous des mots-voiles, démasqués par Klemperer, Hazan et Orwell

Bienvenue sur LinkedIn, temple de l’autopromotion où chaque post est une ode à l’innovation et chaque profil un chef-d’œuvre de vacuité. Ici, la langue de bois règne en maître, drapant le néant dans un jargon managérial qui fait passer le vide pour de la vision. Derrière les « passionné par la transformation digitale » et les « honoré d’annoncer », se cache une machine bien huilée de conformisme et de pouvoir. Inspirés par Klemperer, Hazan et Orwell, nous abordons ce sabir professionnel pour révéler ce qu’il dit vraiment : un monde où l’authenticité est un risque et le bullshit, une stratégie. Préparez-vous à un voyage caustique au cœur du réseau social où tout le monde est disruptif, mais ne progresse pas discursivement.

Ouvrez LinkedIn (là où se trouve aussi cet article !), et c’est une plongée dans un océan de platitudes où tout le monde est « passionné », « disruptif » et « orienté résultats ». Prenez ce verbatim d’un profil type : « Leader visionnaire dédié à la création de valeur et à l’empowerment des équipes dans un écosystème agile. » Traduction ? Rien. Absolument rien. Ce sabir managérial, qui pullule sur la plateforme, est l’équivalent professionnel d’un filtre Instagram : il embellit, homogénéise et, surtout, dissimule. Mais pourquoi ce festival de langue de bois ? Pourquoi chaque post semble-t-il écrit par le même algorithme en costard ? En convoquant Victor Klemperer, Éric Hazan et George Orwell, nous allons déshabiller ce roi nu pour révéler ce qu’il cache : un système où le langage est une arme de pouvoir, de conformisme et de séduction. Accrochez-vous, ça va secouer.

La fabrique du consensus : une novlangue néolibérale

Éric Hazan, dans LQR, La propagande du quotidien, nous avertit : le langage du néolibéralisme est une machine à endormir. Sur LinkedIn, cette LQR prend la forme d’un jargon qui glorifie la « croissance », l’« innovation » et la « compétitivité ». Prenez ce post typique : « Fier de rejoindre une équipe qui redéfinit l’avenir de la transformation digitale ! #Innovation #Leadership. »

Derrière ces mots-entonnoirs (et pas PQ…), comme les appelle Hazan, il n’y a rien de concret – pas de projet, pas de substance, juste une ode au vide. Ce langage n’informe pas, il performe : il signale l’adhésion à l’idéologie dominante, où le travail est une quête héroïque et le capitalisme, un horizon indépassable. Comme la LQR, la langue de bois LinkedIn neutralise toute critique. Qui oserait dire que la « transformation digitale » est parfois un gadget coûteux ou que l’« agilité » cache souvent de la précarité ? Personne, car sur LinkedIn, contester l’ordre établi, c’est risquer l’invisibilité.

Le pouvoir des mots-voiles : masquer pour mieux régner

Victor Klemperer, dans LTI, décrivait les mots de la propagande nazie comme des « Schleierwörter », des voiles jetés sur la réalité pour la rendre acceptable. Sur LinkedIn, les mots-voiles sont légion. Un échec devient une « opportunité d’apprentissage », un licenciement massif, une « optimisation des ressources humaines ».

« Un monde où l’authenticité est un risque et le bullshit, une stratégie »

Prenez ce verbatim : « Honoré d’annoncer une nouvelle étape dans mon parcours, après une période riche d’enseignements. » Traduction : viré, mais avec style. Ce langage euphémistique, digne de la LTI, dissimule les aspérités du monde du travail – burn-out, inégalités, exploitation – sous un vernis d’optimisme. Klemperer nous rappelle que ces voiles ne sont pas innocents : ils désensibilisent, normalisent et, surtout, empêchent de penser. Sur LinkedIn, ils servent à vendre une réalité où tout le monde gagne, sauf ceux qui triment dans l’ombre.

Conformisme et autocensure : la tyrannie du like

George Orwell, dans Politics and the English Language, dénonçait un langage qui « pense à votre place ». Sur LinkedIn, ce phénomène est exacerbé par la tyrannie du like. Chaque post, chaque commentaire doit être lisse, positif, aligné. Bourdieu, dans Ce que parler veut dire, nous éclaire : le langage est un capital symbolique, et sur LinkedIn, adopter le jargon managérial, c’est acheter sa légitimité dans le club des winners. Un profil proclame : « Passionné par la synergie et l’innovation, je m’épanouis dans les environnements disruptifs. »

Derrière ce cliché, une vérité : pour exister sur LinkedIn, il faut parler comme tout le monde. Ce conformisme linguistique, c’est l’autocensure érigée en art. Oser un discours critique – sur la précarité des freelances, par exemple – c’est risquer l’ostracisme. Comme dans 1984 d’Orwell, la langue de bois LinkedIn réduit l’espace de la pensée, transformant les utilisateurs en perroquets d’une idéologie qui récompense l’obéissance.

Une arme de séduction massive : le branding du vide

La langue de bois sur LinkedIn n’est pas un accident, c’est une stratégie. Comme le souligne Hazan, la LQR est une propagande qui séduit en neutralisant. Sur LinkedIn, chaque post est un acte de branding, une opération de séduction auprès des recruteurs, clients ou collègues. Un exemple ? « Immensément reconnaissant pour cette opportunité de contribuer à un projet porteur de sens. » Ce genre de phrase, vague à souhait, ne dit rien du projet, mais tout de l’auteur : il est humble, positif, aligné. Klemperer notait que la LTI servait à glorifier le régime tout en contrôlant les esprits ; sur LinkedIn, la langue de bois glorifie l’individu tout en renforçant le système. Elle est une arme de séduction massive, permettant de se vendre sans prendre de risques. Mais à quel prix ? En gommant toute singularité, elle transforme les utilisateurs en avatars interchangeables d’un même mythe : celui du professionnel parfait.

Déminer la langue de bois, un post à la fois

LinkedIn est un théâtre où la langue de bois joue le premier rôle, orchestrant une comédie où tout le monde est génial, mais personne n’est vraiment soi. Klemperer, Hazan et Orwell nous le rappellent : le langage n’est jamais neutre, il est pouvoir. Alors, et si on dynamitait ce cirque ? Osons un post qui dit : « J’ai raté un deal, et alors ? » ou « La transformation digitale, parfois, c’est du vent. » Bien sûr, le système punit les hérétiques : moins de likes, moins de visibilité. Mais chaque fissure dans ce mur de bullshit est une victoire. Car au fond, LinkedIn n’est qu’un miroir de nos lâchetés collectives. À nous de le briser, un mot à la fois.

La bonne pub sur Pr4vd4.net

Commentez cet article de Pr4vd4

Connectez-vous ou inscrivez-vous pour commenter => Se connecter ou s inscrire sur Pr4vd4

Leave a Reply

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.

To Top