Audrey Diwan, après le succès de L’Événement, s’attaque à une montagne du cinéma érotique, le fameux Emmanuelle, sans rougir. Noémie Merlant se glisse dans le rôle autrefois tenu par Sylvia Kristel, dans une relecture se voulant moderne et engagée. Pourtant, autant vous le dire tout de suite : l’excitation espérée se dissipe rapidement, et ce Emmanuelle nouvelle cuvée peine à enflammer les pafs fions.
Emmanuelle version 2024 : la promesse érotique flaccide
Nous voici plongés dans un monde de luxe où Emmanuelle, sorte de chasseuse de plaisirs à temps partiel, se débat entre des hôtels étoilés et une quête intérieure de satisfaction. Le hic ? Le plaisir promis tarde à pointer le bout de son nez. Audrey Diwan, qui avait déjà montré son goût pour les thématiques intimes et sociales, nous embarque cette fois-ci dans un tourbillon bien trop peau lissé. L’érotisme ? On le cherche désespérément dans des plans aussi froids qu’une chambre de palace climatisée ou un acte chirurgical. Le tout ressemble plus à une pub de parfum qu’à une véritable exploration des sens.
D’ailleurs, on sent bien l’intention de la réalisatrice : Emmanuelle n’est plus un simple objet du désir des autres, mais devient la maîtresse de son propre destin sensuel. Malheureusement, ce virage ne sauve pas l’affaire. La caméra reste désespérément distante, les corps se frôlent sans frissons, et l’on finit par s’ennuyer ferme le zoom au bout de quelques minutes. Le film, annoncé comme sulfureux, est aussi brûlant qu’un glaçon.
La chair est triste, hélas (et on a lu tous les Emmanuelle). L’écran aussi
Ce Emmanuelle version 2024 nous balade à travers les couloirs lisses d’un hôtel 5 étoiles (placement produit ?), mais l’étincelle se fait attendre. À l’image de son héroïne, mandatée pour juger les services de l’établissement, le film évalue, analyse, jauge, sans jamais plonger. Une scène de sexe dans un avion en guise d’introduction ? Une masturbation contemplative au bord de la piscine ? Tout cela a le charme d’un catalogue de décoration minimaliste. Bref, l’émotion érotique est sous contrôle, loin, très loin des palpitations sensuelles attendues.
Les dialogues, comme ce mystérieux « chasseurs et fuyards » lancé en l’air par un personnage secondaire, laissent entrevoir une critique de notre époque, où narcissisme et capitalisme écrasent tout. Mais à force de vouloir être cérébrale, cette relecture d’Emmanuelle devient désincarnée. Pourquoi tant de froideur dans un film censé parler de désir ? On comprend l’idée de Diwan : dépeindre une héroïne perdue dans une société morne, où le luxe rime avec tristesse. Mais pourquoi s’obstiner à faire de ce projet un film érotique ?
Hongkong foufoune, le roi du cuni fou (0.58 sec.)
Heureusement, après une heure et demie d’errance glacée, l’action s’emballe enfin. Emmanuelle quitte les couloirs cliniques de son palace pour se perdre dans les quartiers interlopes de Hong Kong, à la recherche d’une chatte siamoise. Les néons clignotants, les ruelles sombres, et soudain, un sursaut de sensualité ! Le spectateur, tout aussi engourdi que les protagonistes, retrouve un souffle de vie avec des scènes enfin chargées de tension sexuelle.
Une scène finale, dans un hangar, où Emmanuelle dirige les ébats entre un bel inconnu hongkongais et elle-même, sous l’œil attentif d’un Japonais qui traduit, réveille enfin le film. On se dit, un peu tard : Ah, enfin ! L’érotisme tant attendu éclate, laissant entrevoir ce que le film aurait pu être. Dommage que ce soit à la toute fin que Diwan parvienne à capturer l’essence même de l’érotisme : le mystère, l’inconnu, le jeu des corps et des mots.
Clap de fin : une mise en scène sous anesthésie
Ce nouveau Emmanuelle n’est pas à jeter aux oubliettes, mais il est loin de susciter le souffle coupé espéré. Malgré une intention louable de proposer une relecture féministe, ce film nous plonge dans un océan d’ennui poli (anagramme de poil). Audrey Diwan semble avoir oublié que l’érotisme, c’est comme l’art : avant tout le plaisir du spectateur. Et quand ce dernier passe 90 minutes à se demander où est passé le frisson, c’est que quelque chose cloche.
En bref, ce Emmanuelle 2024 est comme un dîner gastronomique où l’on attend le plat principal trop longtemps : un tantinet ruining orgasm, malgré une belle introduction et un creampie réussi.
Lire la critique de Emmanuelle 2024 par Frédéric B., écrivain, littérateur chez Grasset et Flammarion (entre autres)
(c) Ill. Pexels

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